Prime à la casse: une mesure injuste et génératrice de pollution

Ces derniers temps, le gouvernement distribuait des chèques de 1000 euros (puis de 500 euros) à tous ceux qui mettaient leur vieille voiture à la casse pour en racheter une neuve. Bien moins que la révoltante suppression des impôts de succession, mais bien plus que l’inexistante et très modeste taxe carbone, la prime à la casse me paraît injustice sur un plan social, puisque la mesure est financée avec l’argent des impôts de tous ; et que dans ce « tous », il y a « ceux qui ont une voiture » mais aussi « ceux qui n’ont pas de voiture ». En somme, le gouvernement impose aux écologistes, aux pauvres, aux utilisateurs de transports en commun, aux piétons, aux cyclistes et à bien d’autres de donner de l’argent aux automobilistes pour qu’ils puissent acheter une voiture neuve, et mettre leur vieille auto qui marche encore à la casse. Le citoyen qui n’a pas de voiture et qui fait 30 kms de vélo dans le froid hivernal pour se rendre sur son lieu de travail paie pour celui qui va travailler en faisant 10 kms de voiture; est-ce vraiment équitable ?

 

Le but de « cette prime à la casse » est sans doute de créer de la croissance ou, autrement dit, de relancer l’économie du court terme au dépend de l’équilibre environnemental du long terme. Il paraîtrait que pour ne pas sombrer dans la misère, il soit nécessaire de vendre toujours plus de voitures. Mais avec un minimum de bon sens, on peut facilement comprendre que ce qui importe dans le fonctionnement d’une société, c’est de produire ce dont nous avons besoin, de répartir le travail de production entre chacun de nous, puis de répartir équitablement les fruits de notre travail. Pas besoin de produire des choses dont nous n’avons pas besoin au nom de je ne sais quelle loi économique : ce n’est que du gâchis de ressources et d’énergies. D’ailleurs, au Royaume-Uni, suite à l’instauration d’une prime à la casse équivalente, d’immenses surfaces se sont remplies de voitures, qui pour la plupart pourraient encore rouler au moins cinq ans, et qui, malgré tout, attendent d’être détruites.

 

Pire ! En faisant des recherches sur internet, on apprend que « cette prime à la casse » n’est pas une mesure sociale, mais une mesure écologique : il s’agirait, en effet, de « la prime à la casse écologique » ! Comme si jeter à la poubelle une voiture qui marche encore, c’était bien pour l’environnement ! Le raisonnement du gouvernement est le suivant : les voitures neuves polluent moins, mettons donc les anciennes à la casse. Ne serait-il pas plus écologique de remplacer un moteur sale par un moteur propre sans changer de carrosserie, d’habitacle, de roues, de pneus ? Non ! Pour avoir les 1000 euros, au nom de l’écologie, il faut mettre à la poubelle ce qui est encore fonctionnel! N’y aurait-il pas là du Greenwashing (coup marketing destiné à nous faire croire qu’il y a du « vert » là où il n’y en pas) commandité par un lobbying automobile ? Il est assez facile de s’en convaincre en lisant l’enquête du journal Fakir. En effet, on y apprend que contrairement aux affirmations d’un fabricant, un modèle récent de voiture polluerait autant (voire même plus) que l’ancien ;  et surtout, que le fait d’acheter une voiture neuve n’est pas écologique, car la pollution induite par la fabrication d’une nouvelle voiture (et la destruction de l’ancienne) est colossale et ne peut être contrebalancée par une éventuelle économie dans le rejet kilométrique de dioxyde de carbone.

 

http://www.fakirpresse.info/articles/327/la-prime-a-la-casse-ecologique.html

http://www.lepost.fr/article/2010/04/12/2029382_l-absurdite-ecologique-en-images.html

 

(Texte: Matthieu)

8 commentaires:



  1. Et il n'y a pas que le CO2, il y a aussi tous les produits chimiques utilisés lors de la fabrication!


    Notre société base sa croissance sur notre capacité à optimiser la consommation d'énergie, tout en restant une grande gaspilleuse, il n'y a qu'a voir le rendement des bien nommés moteurs
    thermiques...


    D'ailleurs, voici un petit calcul que je trouve significatif sur l'absurdité de nos voitures actuelles :


     - 1l d'essence 35MJ (http://fr.wikipedia.org/wiki/Pouvoir_calorifique)


     - Boucle plate de 20km d'un cycliste en 1h : 1MJ


    Là où une voiture consomme 7l pour 100km (250MJ), notre cycliste en consomme l'équivalent de 15cl (5MJ)!



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  2. Bonjour Gaby,


     


    Très intéressant; et il faut bien noter que l'homme et les animaux se nourrissent d'aliments intégrés dans le cycle du carbone, alors que le pétrole brûlé par les voitures ne peut
    être pris en charge par le cycle du carbone et libére des excédents de CO2 dans l'atmosphère.



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  3. Rassure-toi, je ne défends absolument pas la sacro-sainte industrie auto dans notre pays, et si j'ai l'opportunité de changer de secteur un jour ce sera avec enthousiasme (d'ailleurs vu comme ça
    tourne en ce moment ça risque d'arriver à +/- court terme ).


    Sans me qualifier d'écolo (j'ai beaucoup de progrès à faire de ce côté-là) j'apprécie la mobilité douce, et aimerais voir plus de vélos et moins de voitures dans les villes, surtout quand ce
    n'est pas absolument nécessaire.



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  4. Je n'ai rien contre les personnes qui travaillent pour l'industrie automobile: les gens font avec le système actuel, ils n'ont pas forcément le choix. Ce qui est important, c'est de réfléchir à
    un système plus juste et plus durable, puis d'essayer avec nos moyens de le construire.


     


    Content de t'avoir revu!



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  5. D'accord avec toi... même si travaillant pour un sous-traitant de l'industrie auto cette dernière me fait vivre, comme des milliers (millions) de Français.


    Parler de mesure "écolo" c'est du foutage de g*, dans la mesure où elle a été instaurée pour parer au plus pressé, face à la crise de 2009. Un peu dans le même genre il y a le fameux bonus/malus
    sur les rejets de CO², qui coûte de l'argent à l'Etat... donc au contribuable, même s'il n'utilise peu ou pas de voiture pour se déplacer.


    J'imagine que c'est le principe d'une "société" .



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  6. Merci pour ta contribution, Rodolphe!


     


    Je ne veux évidemment pas te mettre au chômage. J'imagine simplement qu'il est possible d'organiser la société autrement, d'inventer de nouveaux schémas économiques moins axés sur l'exploitation
    frénétique des ressources très limitées de notre planète. Si on produit moins, il y aura moins de travail, plus de temps libre, mais pas nécessairement plus de chômeurs: la difficulté serait
    de répartir le temps de travail entre tous les individus.


     


    Le partage est important dans une société: il peut permettre de corriger certaines inégalités, de sortir des lois "primitives" de la jungle, de lutter contre la loi du plus fort et d'aider
    les plus faibles. Payer des impôts pour que vivent les écoles publiques, les hôpitaux... c'est très bien. Mais payer des impôts pour financer la prime à la casse, ça ne me plaît pas.



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  7. Ben oui, tu sembles surpris. Bien sûr que la prime à la casse n'est pas écologique et qu'elle ne sert qu'à booster la consommation et écouler la production.


    Il y a une autre mesure (qui arrive en fin de vie) qui est tout aussi injuste. C'est la subvention à 50% de l'installation de panneaux solaires pour produire de l'électricité. En gros, tu payes
    8000€, l'état paye 8000€, et EDF te rachète l'électricité produite 5 fois le prix normal. Si tu as 8000€ d'avance, tu peux faire un beau placement sous couvert écologique. Sinon, tu peux juste
    payer les panneaux des autres par tes impôts et ta propre facture EDF.


    Tu parles de ce qui "importe dans le fonctionnement d'une société". J'aimerais bien que tu écrives un article pour définir les buts que devraient viser une société. Comme je l'ai déjà dit, je
    pense moi qu'une société devrait permettre à 100% des êtres humains de s'épanouir. Et elle doit faire ça d'une façon 'renouvelable' parce que c'est la condition sinequanone pour que le mouvement
    soit 'perpétuel'.



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  8. Sur le plan social, tu as raison: il y a une injustice aussi bien dans le fait que ceux qui n'ont pas de voitures paient pour les voitures des autres que dans le fait que ceux qui n'ont pas de
    panneaux solaires paient pour les panneaux des autres. Cependant, en aidant à installer des panneaux photovoltaïques, l'Etat investit dans des énergies très peu polluantes: c'est une mesure
    bénéfique pour l'environnement et le long terme, alors pour la prime à la casse, c'est le contraire.



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