Avant l'Autriche: le Passo Giovo, 2094m. Un beau petit col relativement peu fréquenté par les automobilistes et les motards. Je préfère de loin la marche à pied au vélo. A vélo, il faut toujours se concentrer sur la route. A pied, on peut se laisser distraire par la nature, rêvasser, fusionner avec les paysages. Voyager, c'est avancer lentement, prendre le temps de s'arrêter sur tous les petits détails, rêver, cultiver son imagination. Voyager est aussi un effort: il faut souffrir pour atteindre un but. En somme, pour moi, voyager, c'est marcher; et je crois que jamais je n'aurai le sentiment de voyager en montant dans un avion ou une voiture.
Le Tyrol.
Progressivement, je me suis éloigné des Alpes. J'aurai bien continué à les explorer, mais j'approchais de la fin de mes vacances, et il me fallait regagner le monde urbain et m'intéresser aux possibilités de retour en train.
Je ne connaissais pas grand chose de l'Autriche en arrivant dans ce pays. Sur ma carte, j'ai vu Salzbourg, j'ai pensé à Mozart, et j'y suis allé.
Je suis arrivé à Salzbourg en fin de journée. Le centre ville était interdit aux voitures, et il y avait peu de monde dans les rues pavées. J'ai trouvé que c'était vraiment une belle ville.
Ensuite, j'ai longé le Danube et ai roulé sur la piste cyclable "Strauss".
De fil en aiguille, je suis arrivé un vendredi à 16 heures à Wien; et heureuse et véritable (!) coïncidence: des centaines de cyclistes s'étaient donnés rendez-vous précisement à cette heure-ci dans la capitale autrichienne pour lancer une immense et joyeuse Mass Critic! La Mass Critic, c'est le moment à partir duquel les vélos ne bloquent plus la circulation, mais sont la circulation! Les voitures occupent les villes et les rues, mais n'en sont pas propriétaires. La place des piétons et des cyclistes est bien trop réduites dans de nombreuses villes; et c'est pour faire prendre conscience de ce fait que sont organisées des Mass Critic chaque dernier vendredi de mois dans plus d'une centaine de villes dans le monde! A Wien, nous étions 600!
L'Opéra de Wien. Wiener Staatsoper.
Face à l'Opéra: un écran géant.
Je suis allé jusqu'à Bratislava à vélo, je n'ai pédalé que quelques kilomètres en Slovaquie, mais j'avais le sentiment d'être dans un pays très lointain. Je suis retourné à Wien - il y a moins de cent kilomètres entre les deux capitales. Puis j'ai pris le train; les vacances se terminaient. En fait, pour le train, avec un vélo, il fallait réserver plusieurs jours en avance, et je ne le savais pas. J'ai négocié avec le contrôleur vingt minutes avant que le train parte. Il m'a donné son accord, et je suis allé acheter mon billet pour Strasbourg dans les dernières minutes avant le départ. Il me semble que le train partait à 22h de Wien et arrivait vers midi à Strasbourg! Ne parlant pas un brin d'allemand, j'ai failli ne pas trouver la gare... et une heure avant le départ, j'étais encore perdu et mon pneu a crevé!
Dans le train, j'ai peu et mal dormi, mais je me sentais bien, je pensais aux montagnes et imaginais mes prochains voyages. Il fallait absolument que je reparte, mais avec une tente, en autonomie, comme un grand!
En pleine nuit, vers Munich, la police m'a réveillé pour me demander si la petite sacoche qu'ils avaient retrouvé dans les toilettes étaient bien à moi! Quelqu'un me l'avait volé et l'avait fouillé pendant la nuit, mais le malheureux a tout laissé: étonnamment, mes chaussettes sales, mon pin's du Passo Stelvio et ma collection de cartes postales ne l'intéressaient pas.
Ensuite, j'ai pris un train jusqu'à Bâle, puis un autre jusqu'à Genève, puis un autre jusqu'à Aix-Les-Bains, puis un autre jusqu'à Grenoble; et le lendemain, je suis allé travailler.